La maladie Xeroderma pigmentosum

 

 
 

 

Le Xeroderma pigmentosum (XP) est une maladie monogénique à transmission autosomique et récessive où des mutations dans des gènes de réparation de l'ADN provoquent une hypersensibilité du tissu cutané au rayonnement solaire.

C'est en 1870 que le Docteur KAPOSI, dermatologue hongrois, lui donna son nom. Celui-ci, venant du latin, signifie littéralement derme sec (xeroderma) pigmenté (pigmentosum). Il fait ainsi référence à la peau en parchemin et à la pigmentation hétérogène des parties exposées au soleil. En effet, dès la naissance, la peau des patients XP présente une sécheresse dans la couche cornée et le premier impact avec la lumière provoque des réactions d'hyperpigmentation. Au bout de quelques années, des tumeurs apparaissent avec une fréquence 4 000 fois plus élevée que dans la population générale. Dans les formes les plus graves de la maladie, d'autres manifestations cliniques peuvent être associées, comme des neuropathies et des anomalies du développement.                

1) Données épidémiologiques.    

C'est une maladie rare aux Etats-Unis et en Europe. Son incidence est plus élevée dans les régions à forte consanguinité. Sa fréquence varie de 1 naissance pour 1 000 000 en Europe et aux Etats-Unis à 1 naissance pour 100 000 au Japon, dans les pays du Maghreb ou du Moyen Orient.En France, le nombre de malades est estimé entre 30 et 50, la plupart étant d'origine maghrébine.On pense qu'il y a dans le monde entre 3 000 et 4 000 malades. Mais il reste de nombreux malades non identifiés.         

2) Caractéristiques génétiques   

Le défaut génétique primaire engendre un défaut dans le processus de réparation des lésions induites sur l'ADN par les radiations ultraviolettes. Il se traduit par un phénotype cellulaire d'hypersensibilité aux rayons UV et un taux de synthèse de réparation réduit. On décrit deux types de XP, le XP classique et le XP variant (XPV). Ils se caractérisent tous deux par une extrême sensibilité au soleil mais il s'agit de deux maladies différentes sur le plan mécanistique. Chez les patients atteints de XP classique, c'est le système de réparation par excision de nucléotides ou NER (Nucleotide Excision Repair) qui est déficient. Ce système est l'un des principaux mécanismes qui permettent de restaurer l'intégrité du génome après dommages. Sa déficience se traduit par l'accumulation de mutations de l'ADN entraînant une augmentation du risque de développement de tumeurs cutanées. Quant aux patients souffrant de XPV, ils présentent un défaut dans la réplication de l'ADN endommagé.       Huit gènes ont été identifiés à ce jour. Ils se divisent en 2 catégories: 7 sont impliqués dans le XP classique et 1 dans le XPV. Les différents symptômes, leur gravité ainsi que l'âge d'apparition varient en fonction du gène muté.Ainsi, pour les formes classiques, on a:  

XPA: forme très sévère avec anomalies neurologiques importantes. Absence totale de réparation de l' ADN.

XPB: forme très rare (on dénombre 3 cas dans le monde), recouvrement avec le syndrome de Cockayne.  

XPC: forme la plus fréquente. Absence totale de problèmes neurologiques.

XPD: forme très hétérogène par la différence des anomalies. Toujours accompagnée d'anomalies neurologiques plus ou moins importantes.

XPE: forme rare. Symptômes relativement légers

XPF: forme bénigne. La réparation est totale mais extrêmement lente. Elle concerne principalement la population japonaise.

XPG: forme très rare, recouvrement avec le syndrome de Cockayne. Elle ne concerne que quelques patients.

3) Signes cliniques

La plupart des personnes atteintes présentent des " coups de soleil " sévères après une courte exposition (au soleil). Ces brûlures ne se cicatrisent pas aussi rapidement que d’ordinaire et peuvent persister plusieurs semaines. Ce type de brûlure qui intervient dès la première exposition d’un enfant au soleil peut conduire à établir un diagnostic de Xeroderma Pigmentosum .

Cependant, toutes les personnes atteintes de Xeroderma Pigmentosum  n’attrapent pas des " coups de soleil " aussi facilement et la maladie peut rester insoupçonnée jusqu’à ce que des modifications n’apparaissent sur la peau.

               a) signes cutanés généraux: 

La photosensibilité cutanée est à l'origine de:

- assèchement de la peau
- éphélides (tâches de rousseur) en excès
- érythèmes sévères: congestion de la peau provoquant des rougeurs
- photophobie: sensations pénibles de la lumière sur la peau
- peau atrophiée
- hyperkératose de la peau: épaississement de la couche cornée
- hyperpigmentation inégale en intensité et en distribution
- hyperpigmentation irrégulière en bandes ou en réseaux
- hémangiomes capillaires (pellicules)
- naevus flammeus: angiome responsable d'une petite tâche rose saumon sur le visage
- télangiectasies de la peau: dilatation de petits vaisseaux qui apparaissent alors en transparence sous la peau

 

   La peau présente le même aspect que celle des personnes âgées ayant  passé une grande partie de leur vie au soleil. Ces modifications apparaissent souvent dès la prime enfance et presque toujours avant 20 ans. Les yeux deviennent irrités, rouges et larmoyants. 

                b) cancers de la peau

Un certains nombre de modifications de la peau peuvent évoluer en cancer. Des tumeurs apparaissent, d'abord sous forme bénigne, mais elles dégénèrent assez rapidement . Elles concernent le plus souvent le visage et les autres parties du corps particulièrement exposées (yeux, lèvres, extrémités de la langue). Ces cancers sont de trois types:   

        - le carcinome des cellules basales de la peau (épithéliomas basocellulaires): destruction locale de la peau et des tissus sous jacents.

        - le carcinome des kératinocytes (épithéliomas spinocellulaires): plus invasif que le carcinome basal, car susceptible de provoquer des envahissements ganglionnaires et des métastases. 

        - le mélanome: les mélanocytes se mettent à proliférer de manière anarchique, d'abord dans l'épiderme puis dans le derme, d'où elles gagnent la circulation sanguine générale et entraînent la formation de métastases.

                c) autres problèmes médicaux

Environ  20% des personnes atteintes de XP peuvent présenter des troubles nerveux, moteurs ou retard de la croissance et du développement sexuel. Ces troubles neurologiques sont souvent peu importants lors de l'enfance et de l'adolescence mais lorsqu'ils existent, ils tendent à s'aggraver avec le temps.

        - surdité

        - atrophie optique

        - conjonctive télangiectasies

        - strabisme

        - aréflexie / hyporéflexie

        - convulsions épileptiques

        - cortex cérébral atrophié sans hydrocéphalie

        - E.E.G anormal ( électroencéphalogramme)

        - retard mental sévère

        - ectopie testiculaire/ cryptorchidie

        - métabolisme des acides aminés anormal

        - anomalie de la dentition

Pour la forme XPV, qui représente 20 à 25% des patients XP, les premiers signes apparaissent plus tardivement, entre 15 et 40 ans. La progression de la maladie est beaucoup plus lente et l'espérance de vie plus longue, toutefois moins que celle de la population normale.

4) Traitement

Il n'existe à ce jour aucun traitement curatif. La seule solution thérapeutique a été, jusqu'à présent, la prévention, en mettant l'individu à l'abri de la lumière afin d'éviter la formation de tumeurs, l'ablation chirurgicale des tumeurs et l'utilisation de rétinoïdes pour empêcher la progression des cancers cutanés. Une autre possibilité thérapeutique est l'autogreffe d'une partie de la peau du malade non exposée. Toutefois, malgré les efforts de recherche, aucun progrès n'a été accompli pour un traitement efficace à long terme. Même la greffe de peau ne peut constituer une thérapie à long terme, car la peau greffée reste génétiquement sensible au soleil et développe finalement des cancers.